Djibouti : une cérémonie traditionnelle se transforme en bain de sang

Le 21 décembre, dans la ville de Balballa à Djibouti, le pouvoir et l’opposition se sont affrontés avec une telle violence. Des personnes ont été blessées et d’autres ont perdu la vie, mais jusque-là, le bilan des victimes publié par les deux parties ne concorde pas.

 

Deux versions différentes

A l’aube, le lundi 21 décembre, dans le quartier de Buldhoqo à Balballa, à proximité de Djibouti-Ville, alors qu’une cérémonie traditionnelle se tenait pour rendre hommage au fondateur de Yonis Moussa, une des tribus djiboutienne, des affrontements entre forces de l’ordre et l’opposition éclatent. Questionner sur ce qui s’est réellement passé, les deux parties ont avancé leur propre version des faits. Pour l’Union pour le Salut National (USN), une coalition de sept partis d’opposition, les affrontements ont commencé quand la police a voulu disperser la foule. L’USN souligne que la cérémonie été interdite à cause de l’état d’urgence imposé dans tout le pays mais aussi et surtout parce qu’elle rassemblait une grande partie des membres de l’opposition. Une affirmation qui a tout de suite été contredite par Hassan Omar Mohamed, le ministre djiboutien de l’intérieur, qui assure que la cérémonie a obtenu une autorisation légale mais les forces de l’ordre ont eu l’ordre de déplacer la foule vers un emplacement mieux adapté pour des raisons de sécurité. C’est à ce moment-là, explique-t-il, que des personnes sortant de la foule ont commencé à s’en prendre aux policiers avec des coups de machette et des kalachnikovs, forçant ces derniers à riposter.

 

Deux bilans différents

Mais le déroulement des événements n’est pas le seul point sur lequel les deux parties apportent des versions différentes. En effet, même sur le bilan concernant les victimes, les chiffres sont bien différents. Du côté du gouvernement, le rapport publié le mardi 22 décembre fait état de 7 morts parmi les civils et 73 blessés dont une cinquantaine appartenant à la police. De son côté, l’USN avance un bilan beaucoup plus lourd avec 25 morts et plus de 150 blessés. Pour expliquer ce nombre, l’USN raconte qu’un peu plus tard, une réunion se tenait dans le bureau exécutif pour « discuter de la situation ». C’est là que des policiers ont brusquement ouvert le feu et blessant plusieurs personnes dont Ahmed Youssouf Houmed, le président de l’USN. En tout cas, pour apporter plus de lumière sur cette histoire, le ministre djiboutien de l’intérieur a annoncé l’ouverture d’une enquête pour mesurer les responsabilités de chaque partie.

 

Djibouti : une grande position stratégique

En tout cas, à quatre mois des élections présidentielles (prévues en avril 2016), cette répression sanglante risque de coûter cher à Ismaël Omar Guelleh, le président actuel djiboutien, s’il se lance dans un quatrième mandat. D’autant plus que les partis de l’opposition comptent se mobiliser s’il dépose sa candidature. Pour rappel, depuis 2010, la Constitution ne pose plus de limite sur le nombre de mandats présidentiels. Et depuis un mois, les manifestations sont interdites à cause de l’Etat d’urgence instauré par le gouvernement, visant à lutter contre le terrorisme. Rappelons aussi que le pays bénéficie d’une grande position stratégique car il se situe entre le continent africain et la péninsule arabique. En outre, il abrite la plus grande base militaire française au monde.