Egypte : la prison « Scorpion », le calvaire de ses détenus

Au Caire en Egypte, les détenus politiques incarcérés dans la prison « Scorpion » se retrouvent priver de tout : nourritures, boissons, visites des proches et encore pire : à l’accès aux soins. Suite à ses recherches, Human Right watch dénonce la situation dans un rapport de 80 pages intitulé « ‘We Are in Tombs’: Abuses in Egypt’s Scorpion Prison».

Des arrestations arbitraires

Depuis sa construction en 2013, la prison « Scorpion » en Egypte a toujours été destinée aux prisonniers politiques ou ceux qui compromettent la sécurité de l’Etat. Mais depuis juillet 2013, date où l’actuel dirigeant Abdel Fattah al-Sissi soutenu par l’armée égyptienne a renversé Mohamed Morsi du pouvoir, « Scorpion » est devenu l’enfer des opposants. Les investigations à propos des arrestations ont en effet montré des  chiffres exorbitants : entre juillet 2013 et mai 2014, le nombre de personnes arrêtées ou inculpées par le gouvernement approche les 41 000. Celui de 2014 jusqu’à présent est estimé à 26 000. Le gouvernement a d’ailleurs avoué avoir arrêté 34 000 opposants depuis 2013.

« Le gouvernement Al-Sissi a clairement montré comment il traite les opposants politiques. Il les arrête, les fait juger lors de procès non conformes aux procédures équitables et les détient dans la prison « Scorpion » » explique dans son vidéo un haut responsable de Human Right Watch. Ce dernier a évalué dans ce centre hautement sécurisé à peu près un millier de prisonniers dont des hauts placés des Frères musulmans, des présumés membres du groupe Etat islamique, des journalistes ou encore des médecins.

Des conditions déplorables

Bien que le ministère de l’intérieur égyptien fasse en sorte que les traitements à « Scorpion» restent un secret, Human Right Watch a pu établir un rapport sur les souffrances quotidiennes de ces détenus. Publié aujourd’hui 28 septembre, ce compte-rendu met en lumière tous les supplices des détenus.

Se trouve en tête de la liste le fait que l’Etat égyptien ne se donne pas la peine de garantir le strict minimum des besoins auxquels ces personnes ont droit selon les normes internationales. Les cellules dans cette prison ne sont munies ni de literies ni d’articles d’hygiènes de base. De surcroît, l’Etat refuse de fournir de la nourriture, de l’eau ou des soins aux prisonniers. Les rares fois où ça arrive, les provisions sont tellement minimes. Pour se révolter contre cela, plusieurs prisonniers de « Scorpion » ont essayé de mener une grève de la faim, tentatives qui généralement se soldaient par l’échec. Ils n’ont pu récolter que des tortures à volonté ou des prolongations de la durée de leur détention.

Des détenus privés de visites et de soins

Tout cela n’est que la partie visible de cet iceberg de supplices ; effectivement il y a pire : la santé des détenus est complètement ignorée. La prison « Scorpion » ne possède aucun hôpital, aucune infirmerie, même pas des visites régulières d’un quelconque médecin selon toujours le rapport de Human Rights Watch.

Les prisonniers nécessitant des soins médicaux n’ont donc aucun autre choix que de compter sur leurs familles. Malencontreusement, livrer des médicaments et de la nourriture en ces lieux n’est pas évident depuis que le ministère de l’intérieur a interdit toutes visites que ce soit de la part des familles ou des avocats. Cette interdiction a été prononcée officiellement  entre mars et août 2015 mais les circonstances actuelles concernant les visites sont pratiquement pareilles qu’en ces périodes.

Par conséquent 6 personnes incarcérées sont décédées entre mai et octobre 2015 faute de soins et de nourritures adéquates. Parmi elles, 2 ont eu le cancer, un autre était victime de diabète, un autre encore a eu l’hépatite C.  Les autorités ont refusé catégoriquement d’accorder la liberté conditionnelle afin de traiter les maladies ou de fournir les soins nécessaires à ces détenus. Pourtant, les familles ont suivi toutes les procédures exigées, certaines ont même écrit directement à Al-Sissi en personne. Mais le gouvernement reste sourd en dépit  des demandes à maintes reprises effectuées par les familles, des ordonnances d’un juge ou d’un procureur.

Le gouvernement et le ministère de l’intérieur égyptiens sont appelés par HRW à prendre les mesures nécessaires afin d’améliorer la situation, non seulement au sein de la prison « scorpion » mais dans tous les centres de détention dans le pays, avant que d’autres terribles événements surviennent.