Kenya : polémique autour de la fermeture du camp de Dadaab

A un mois de la fermeture annoncée du camp de Dadaab, plus de 30.000 somaliens sont retournés dans leur pays. Si le gouvernement kenyan parle de « retours volontaires », Conseil norvégien des réfugiés dénonce des pressions et évoque une violation des lois internationales.

 

Deuxième pays d’accueil des réfugiés en Afrique

En avril 2015, l’université de Garissa, à 150 kilomètres de la frontière avec la Somalie, a été victime d’une attaque terroriste. Au bilan : 147 personnes ont perdu leur vie et au moins 79 autres ont été blessées. Mais si ce drame a bouleversé le Kenya, il a surtout relancé le débat sur les réfugiés. Il est à noter que le Kenya est le deuxième pays d’accueil des réfugiés en Afrique après l’Ethiopie.

Selon le Haut-Commissariat des réfugiés, plus de 550.000 déplacés de différentes nationalités sont actuellement répartis entre les différents camps du pays dont celui de Kakuma au Nord-Ouest et celui de Dadaab au Nord-Est. Si le premier abrite surtout des soudanais puisqu’il est situé à proximité de la frontière qui sépare le Kenya avec le Soudan, le second est surtout occupé par les somaliens.

Mais les conditions de vie dans ces camps sont déplorables, particulièrement pour le camp de Dadaab. Ouvert en 1991, le camp a à son actif 350.000 réfugiés dont 263.000 somaliens. Il est donc surpeuplé et ses occupants vivent dans une extrême précarité et pauvreté qui conduisent souvent à des troubles psychiatriques.

Pour alléger le camp, le Kenya et la Somalie ont signé un « accord tripartite » en 2013. Cet accord devait faciliter le retour des somaliens habitant les camps kenyans vers leur pays d’origine. Malheureusement, peu ont emprunté cette voie à cause de l’instabilité persistante en Somalie.

 

Fermeture du camp de Dadaab

Après 25 ans d’accueil, le Kenya semble dépassé par un afflux persistant qui affecte son économie, sa sécurité et son environnement. De ce fait, le gouvernement kényan a annoncé sa volonté de fermer ses portes aux réfugiés en mai dernier. Depuis, le pays a supprimé le DRA qui était l’organe chargé de traiter les demandes d’asile. Aujourd’hui, il envisage la fermeture des camps à commencer par celui de Dadaab. Une décision qui a particulièrement irritée le HCR qui estime que : « fermer les camps ne résoudra rien. De nombreuses régions de la Somalie sont loin d’être stabilisées. La situation n’est pas propice à un retour ».

Quoi qu’il en soit, 24.248 somaliens sont retournés dans leur pays depuis le début de cette année. Et si les autorités locales assurent qu’il s’agit de « retours volontaires », le Conseil norvégien des réfugiés (NRC) semble réticent. « D’après ce que nous avons constaté sur le terrain, les retours ne sont pas volontaires, ni dignes et ne respectent pas les règles de sécurité de base » a dénoncé l’organisation dans un communiqué, le lundi 10 septembre dernier.

A Kismayo, ville au sud de la Somalie, où les retournés ont été transportés, Ahmed Mohamud Abukar témoigne : « On nous a dit qu’il était temps de partir, que si nous restions, peut-être que l’armée serait envoyée. L’accès aux services de santé et les rations de nourritures ont aussi été diminuées ». Mais la vie est loin d’être mieux à Kismayo. Certes, le HCR accompagne les retournés en leur proposant une aide initiale de 200 dollars par personne, une aide financière au cours des six premiers mois et des coupons alimentaires mais ce n’est pas assez. En effet, l’hébergement pose problème et conduit les familles à s’entasser dans des camps de déplacés de fortune.