Mexique : droits bafoués des femmes incarcérées

Le Mexique n’a jamais été un modèle dans le respect des droits de l’homme. Le mardi 28 juin dernier, c’est sur la violation des droits des femmes incarcérées dans les prisons mexicains qu’Amnesty a publié un rapport accablant.

 

Victimes d’abus sexuels

Une fois de plus, les autorités mexicaines sont accusées d’abus. Dans son rapport publié le mardi 28 juin dernier, Amnesty International dénonce les abus sexuels commis contre les femmes incarcérées pour obtenir des aveux. Représentant 7% de la population carcérale, les cent femmes interviewées par l’équipe de l’organisation de défense des droits de l’homme ont toutes affirmé avoir été victimes d’agressions, de coups ou d’attouchements sexuels. Selon le rapport, 72 d’entre elles ont été victimes d’agressions sexuelles tandis que 33 ont été violées.

Parmi ces victimes : Monica, 26 ans et mère de quatre enfants. Arrêtée en 2013, elle raconte avoir été « violée par six policiers, elle a reçu des décharges électriques sur les parties génitales, a été asphyxiée à l’aide d’un sac plastique et a eu la tête plongée dans un seau d’eau ». C’est ainsi que la jeune fille avoue avoir signé les aveux dans lesquels elle admet être un membre du cartel de la drogue. Si une plainte a été déposée par la Commission nationale des droits des humains (CNDH), aucune enquête n’a été menée.

La grande majorité des femmes incarcérées sont liées aux mafias. Et c’est normal explique Yves Prigent, responsable du programme « Responsabilité des Etats et des entreprises », puisque « Elles veulent subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants. Cela en fait des proies faciles pour les cartels qui les recrutent comme «petites mains » ». De ce fait, « elles sont aussi une proie facile pour les autorités. Plus faciles à arrêter, elles permettent de remonter jusqu’aux cartels » a-t-il précisé.

 

Une violence généralisée

Et le pire, c’est que cette pratique semble se généraliser. En avril dernier, une vidéo  choquante montrant des policiers en plein interrogatoire a fait le tour du web. Cette vidéo a suscité l’indignation de la société mexicaine puisqu’on y voit une femme en train de se faire étouffer par un sac plastique. Si le ministre mexicain de la Défense s’est publiquement excusé, aucune réelle enquête n’a été menée.  « Quand on parle de violence contre les femmes, la méthode préférée de l’Etat est la violence sexuelle. Cela a été une découverte effrayante » a déploré Madeleine Peinman, une des auteurs du rapport.

Et ce manque d’engagement de l’Etat dans la protection de ces femmes a été particulièrement pointé du doigt par Amnesty International dans ce nouveau rapport. Sur les cent femmes questionnées par l’organisation, soixante-dix ont affirmé avoir déposé une plainte mais une enquête n’a été ouverte que sur 22 cas mais « personne n’a été poursuivi ». Durant cette enquête, Amnesty a affirmé que les autorités mexicaines l’ont empêché d’accéder à des informations qui pourraient être cruciales.

Depuis 1991, seuls 15 cas d’abus ont conduit à des arrestations sur les plusieurs milliers de cas signalés. En 2015, plus de 2.400 plaintes de tortures ont été déposées mais aucune n’a abouti à des enquêtes. Actuellement, un projet de loi sur la torture est en pleine discussion au Congrès mexicain. « C’est évidemment un texte très attendu. Malheureusement, il n’empêche pas de se servir des propos extorqués sous la torture alors d’un procès » a déclaré Yves Prigent.