Haïti : L’ « après ouragan Matthew »

Trois semaines après le passage de l’ouragan Matthew, Haïti n’arrive pas encore à se relever. Les aides humanitaires ne suffisent pas à satisfaire le peuple affamé, malade et sans maison.

 

De lourds dégâts

L’ouragan Matthew, qui a frappé Haïti le 04 octobre dernier, a laissé de lourds dégâts au pays et à sa population. D’après le dernier bilan officiel, il a causé la mort de 546 personnes. L’ONU estime le nombre des habitants dans le besoin d’une assistance d’urgence à 1,4 millions. Ces personnes se retrouvent dans une situation précaire aux lendemains du passage de l’ouragan : sans habitation, sans nourriture, sans accès aux soins et à l’eau potable.

D’un autre côté, le choléra fait rage dans le pays. Il s’est facilement répandu suite aux plusieurs inondations qui y ont eu lieu après l’ouragan. L’OMS a enregistré autour de 800 cas, dont 200 dans le département de la Grande-Anse, depuis le 04 octobre 2016. À Moron, une commune de l’arrondissement de Jérémie, il faut prévoir 25.000 dollars pour rénover le centre de santé, fortement endommagé. De plus, il n’y a pas suffisamment de matériels pour soigner et installer confortablement les patients.

Par ailleurs, les 175.000 individus dont les habitations ont été détruites se réfugient dans les établissements scolaires qui n’ont pas été complètement endommagés. Comme à Jérémie, 3.000 sinistrés, l’équivalent de 525 foyers, s’abritent provisoirement dans le lycée Nord Alexis. Ceux qui restent encore dans leurs maisons vivent presque à ciel ouvert. Toutefois, tous essaient de récupérer les matériaux, encore utilisables, pour réparer leurs maisons détruites. À noter que 770 écoles ont été dévastées par l’ouragan Matthew. Les cours sont suspendus jusqu’à nouvel ordre. D’ailleurs, les matériels scolaires, des écoliers comme des établissements, sont quasiment abîmés par l’eau.

L’ouragan Matthew, avec ses vents à 230 km/h, a ravagé les champs de culture des habitants du Moron, toujours dans l’arrondissement de Jérémie. Les caféiers et les cacaoyers, sur lesquels repose l’économie locale, ont été emportés par l’ouragan. De même pour les plantations de manioc, patates douces…. Les habitants, affamés et sans abri, se retrouvent alors sans sources de revenus.

 

Insuffisance des équipements d’aide

Les organismes humanitaires, notamment le Care, interviennent face aux difficultés rencontrées par la population locale. Ils organisent des distributions d’équipements et de kits sanitaires dont des bâches, des seaux, des brosses à dents, des savons …. Toutefois, le mauvais état des routes ne permet pas de transporter assez de matériels dans les endroits les plus touchés. À cela s’ajoutent des cas de pillage des convois dans les régions isolées. Les auteurs de ces actes bloquent le passage des véhicules par des barricades en espérant qu’elles apportent de la nourriture. Une situation qui ralentit encore plus l’arrivée des aides à destination.

Suite à cette insuffisance de matériels d’aide, la mairie et les responsables des quartiers établissent une liste des personnes qui reçoivent les kits par ordre de vulnérabilité. Les orphelins et les handicapés figurent en tête de liste. Cette méthode ne plaît pas aux habitants, qui voient une once d’injustice dans le procédé, puisqu’ils estiment qu’il y a des gens dans le besoin qui n’apparaissent pas dans le répertoire.

Ainsi, des débordements risquent de se produire pendant les distributions d’aides. C’était le cas à Dame-Marie, une ville dans sud-ouest d’Haïti. Le mardi 24 octobre 2016, une livraison d’aide aux sinistrés de l’ouragan a pris une tournure dramatique. La foule s’est empressée à la décharge du convoi. Suite à cela, des casques bleus Brésiliens ont tiré des balles en caoutchouc et deux grenades lacrymogènes. Des éléments de la police nationale, quant à elle, ont utilisé de vraies balles. Celles-ci ont touché 4 personnes et ont ôté, au passage, la vie d’une adolescente et blessé trois individus. Suite à cette tragédie, Mourad Whaba, coordonnateur humanitaire de la Mission des Nations unies en Haïti a souligné qu’une enquête onusienne a été lancée.