Soudan du Sud : les responsables de crimes doivent rendre des comptes aux victimes

L’ONG Human Rights Watch dénonce dans un rapport publié lundi des viols et de nombreux abus perpétrés par des soldats lors des affrontements à Juba, capitale du Soudan du Sud. Certains détails semblent accabler les forces gouvernementales. Pour l’anniversaire de l’accord de paix, Amnesty international appel à ce que justice soit rendue aux victimes.  

 

Des violences à caractère ethnique

Pendant et après les combats opposant les troupes gouvernementales et les anciens rebelles fidèles au vice-président Riek Machar, « des soldats ont tué et violé des civils, et se sont livrés à de très nombreux actes de pillage de biens civils, notamment des produits humanitaires », a déclaré HRW lundi. L’ONG pointe du doigt les soldats du gouvernement de l’Armée de libération du peuple soudanais (SPLA), commandée par le général Paul Malong et le président Salva Kiir. Les soldats de l’opposition auraient également commis des exactions, mais HRW « n’a pas pu vérifier de manière indépendante » ces informations.

HRW a recensé des centaines de cas où les forces gouvernementales ciblaient les civils en fonction de leur appartenance ethnique. C’est ce qui s’est passé par exemple à l’hôtel Bedale, dans le quartier Atlabara, avant le cessez-le-feu. « Nous avons prié le garde de ne pas ouvrir. Ils ont demandé : pourquoi cachez-vous les Nuer !? Puis ils ont commencé à tirer avec leurs mitrailleuses lourdes à travers les portes et les murs. Voilà comment mon ami Mading Chan a été tué », a raconté un homme de 35 ans qui se cachait avec 27 autres hommes nuer.

Les responsables doivent rendre des comptes

Le 17 août 2015, un accord de paix a été signé à Adis-Abeba, capitale de l’Ethiopie. Selon cet accord, l’Union Africaine (UA) doit créer « un tribunal hybride qui enquêtera sur les crimes de génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité depuis le début du conflit en décembre 2013 ». Toutefois, ni l’UA, ni le Soudan du Sud n’a fait d’efforts pour mettre ce tribunal sur pied. Pendant ce temps les conflits continuent et s’intensifient, mettant en péril les droits humains de millions de Sud-Soudanais.

La paix durable est impossible à atteindre si l’impunité règne au Soudan du Sud. Elisabeth Deng, chercheuse sur le Soudan du Sud à Amnesty International, a rappelé l’urgence de la quête de justice. « L’Union africaine doit cesser de traîner les pieds et prendre des mesures concrètes afin de créer ce tribunal. Elle doit notamment recueillir et préserver les éléments de preuve avant qu’ils ne disparaissent et que les souvenirs des témoins ne s’estompent », a-t-elle déclaré.

La création d’un tribunal hybride permet d’éviter que ces violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains se répètent au Soudan du Sud. Amnesty international appelle à ce que tous les responsables de ces crimes soient traduits en justice. L’UA devra veiller au respect des normes internationales en matière d’équité, s’inspirer des autres tribunaux hybrides, inclure des Sud-Soudanais dans la procédure et garantir la protection des victimes et des témoins.