Libye : le « camp d’Auschwitz » de notre ère

Contrairement à l’opinion commune, la Libye n’est pas uniquement une escale pour les migrants qui veulent rejoindre l’Europe. C’est aussi un endroit où sévices, esclavage et trafic d’êtres humains sont monnaie courante.

« Un marché humain à ciel ouvert»

Depuis la mort de Mouammar Kadhafi en 2011, la Lybie plonge chaque jour dans un chaos sans précèdent. Avec une situation politique instable, le pays se trouve actuellement dans les griffes de quelque 200 000 milices, essentiellement des toubous, trafiqueurs d’armes, de marchandises et d’êtres humains. Le reportage du photographe Narciso Contreras, gagnant du 7è prix Carmignac du photojournalisme, illustre parfaitement les violations aiguës des droits de l’homme dont la Lybie est le théâtre.

Les premières victimes de ces milices sont les migrants africains désirant se rendre en Europe via la Méditerranée. Selon toujours le reportage du photographe Narciso Contreras, la vente d’esclaves est l’un des premiers dangers menaçant ces personnes. En effet, on compte plusieurs réseaux de trafiquants d’êtres humains de très haut niveau en Libye dont les milices toubous, les « Fils de Suleiman », les milices « AMO ou encore les hommes de Daech. Ces milices kidnappent tous ceux qui ont la malchance de croiser leurs routes sans aucune raison avant de les enfermer dans des endroits ignobles. D’après plusieurs témoignages, ces victimes sont «traitées comme du bétail » avant que leurs « acquéreurs » arrivent.

De l’inhumanité à volonté

En réalité, vendus ou pas, la majorité des migrants qui débarquent en Libye vivent un enfer quotidien. Ils se trouvent exploiter dès leur arrivée sur les frontières libyennes en particulier dans la région du Fezzan où est localisée l’une des routes principales empruntées. Les milices qui contrôlent la frontière font payer à ces migrants un « droit » de 250 dinars libyens chacun (soit 150 euros) afin de pouvoir passer les frontières. Les bagages sont taxés selon leurs poids. Mais le paiement de ce soi-disant droit n’est en aucun cas une garantie de sécurité pour ces migrants car d’autres sévices les attendent de l’autre côté des frontières.

L’influence de ces trafiquants s’étend jusqu’aux centres de rétention où sévices, coups, viols et assassinat sont le lot quotidien des victimes. « Une fois arrêtés, tous ces gens doivent payer pour être libérés » explique encore le journaliste. « Ils travaillent donc gratuitement pendant un temps indéfini. Cela s’appelle de l’esclavage » se révolte Narciso Contreras.

Toutes les femmes dans ces prisons subissent chaque jour des viols et nombre d’entre elles sont tombées enceintes sinon traumatisées ne connaissant plus ni leur nom, ni leur origine ni quoi que ce soit d’autres. De surcroît, les détenus n’obtiennent que rarement de la nourriture ou de l’eau, les trafiquants les laissent mourir de faim ou les exécutent carrément quand ça leur chante. « J’ai vu ceux qui réclamaient à manger se faire frapper à coups de bâton. J’ai aussi vu des corps que les miliciens jetaient à la mer. Sans doute des prisonniers qui leur avaient résisté» raconte toujours Narciso Contreras. Amnesty international a d’ailleurs déjà appuyé sur la sonnette d’alarme à ce propos dans un rapport publié en juillet 2016.

Ces atrocités expliquent donc le fait que malgré les multiples naufrages sur la Méditerranée, les gens donnent littéralement tous ce qu’ils possèdent afin de rejoindre l’Europe, la seule lueur d’espoir dans leur terne existence. « On parle de 1 million de candidats à la traversée de la Méditerranée » car « les migrants sont piégés. Ils n’ont d’autre choix que l’esclavage, le départ ou la mort ».